Salmanazar I contre le pays d’Urartu

D.D. Luckenbill, en 1926, dans « Ancient Records of Assyria and Babylonia » a traduit une des premières opérations militaires médio-assyriennes, celle de Salmanazar 1er, rédigée à l’occasion de la restauration d’un temple dans Assur. Ce roi a régné autour de 1250 avant J-C.
Ici il a été choisi de reprendre les orthographes des toponymes des premiers traducteurs et, entre parenthèses, de faire apparaître les désignations de l’âge du bronze les plus communes, avec l’éventuel lien vers l’article de localisation de ce blog.
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Salmanasar I, préfet de Bel, prêtre d’Assur, le merveilleux, vice-roi des dieux, le prince favori d’Ishtar, qui restaure les lieux de cultes et d’offrandes, qui augmente les sacrifices faits à tous les dieux, le fondateur de splendides cités, le constructeur de l’Eharsagkurkurra, la frontière des dieux, la montagne des pays, berger de tous les peuples, dont les actes augmentent le bien d’Assur, guerrier fort, puissant au combat, qui brûle l’ennemi, tonne parmi ses ennemis, qui |…]
Au début de mes fonctions de prêtre, le pays d’Uruadri (Urartu) se rebella, et sur Assur et les grands dieux, Mes Seigneurs, j’ai levé mes mains en prière, j’ai mobilisé mes armées, et j’ai affronté leurs puissantes forteresses montagneuses. J’ai conquis les pays de Himme (Himus), Uadkun (Tikunani), Bargun (Arbaki), Salua (Sahlala), Halila (Kalilu), Luha (Luhuzattiya), Nilipahri (Nilimmar), Zingun (1) – Huit pays armés. J’ai capturé 51 de leurs villes. J’ai brûlé, et j’ai saisi leurs propriétés en tant que tribut. En une durée de 3 jours j’ai amené le pays entier d’Uruadri (Urartu) à se soumettre aux pieds d’Assur, Mon Seigneur. J’ai sélectionné leurs jeunes hommes, je les ai pris en service, je les ai choisis pour qu’ils me craignent. Au regard de leur région montagneuse, je leurs ai imposé un lourd tribut permanent.
La ville d’Arina (Arinu), une puissante forteresse de montagne, qui s’était autrefois révoltée, méprisant le dieu Assur, avec l’aide d’Assur et des grands dieux, mes seigneurs, j’ai pris cette ville, je l’ai détruite et j’ai dispersé du kudime dessus. J’en ai ramassé la poussière et je l’ai déversée à la porte de ma ville, Assur, pour les jours à venir. A ce moment-là, j’ai amené la totalité du pays de Musri (Mazuwari) à se soumettre aux pieds d’Assur, Mon Seigneur.
Lorsque, à la demande des grands dieux, je me suis avancé contre le pays d’Hanigalbat avec les puissantes armées de mon seigneur Assur, je me suis frayé un chemin à travers des routes difficiles et des cols étroits. J’ai entouré Shattuara, le roi du Hanigalbat, les armées des Hittites et des Ahlami (Araméens) avec lui. Il a coupé les passages et mon approvisionnement en eau. A cause de la soif et de la fatigue, mon armée s’est courageusement avancée parmi les masses de ses troupes, et j’ai mené une bataille et j’ai accompli leur défaite. J’ai tué un nombre incalculable de ses hôtes vaincus et éparpillés. Contre le roi lui-même, à la pointe de la lance, jusqu’au coucher du soleil, j’ai combattu. J’ai abattu leurs hordes. J’ai renversé et fait prisonniers 14 400 d’entre eux. J’ai capturé neuf places fortes et sa capitale. J’ai transformé en tells et ruines 180 de ses villes. A ce moment-là, j’ai capturé leurs cités depuis la ville de Taidi (Ta’idu) jusqu’à la ville d’Irridi (Irridu), la totalité de la région des montagnes Kasiari, jusqu’à la ville Eluhat (Eluhhut), la place forte de Suda (Suda), la place forte de Harran (Harranu) jusqu’à Karkémis (Karkémis), qui est sur les rives de l’Euphrate. J’ai soumis leurs terres à mon empire, et j’ai brûlé le reste de leurs villes.
Alors, le pays des Kuti (2), dont le nombre est innombrable comme les étoiles du ciel, qui savent piller, s’est abattu sur moi et a attisé l’inimitié. Sur Assur et les grands dieux, Mes Seigneurs, j’ai élevé mes mains en prières, disant : « Ils m’ont fidèlement promis leur bonne foi ». J’ai laissé derrière moi le camp de mon armée, j’ai pris le meilleur tiers de mes chars et je me suis précipité au milieu de la bataille contre eux. Depuis les frontières du pays d’Uruadri (Urartu) jusqu’au pays de Kutmuhi (Kummuhu), des régions éloignées, une terre aux vastes étendues, j’ai renversé leurs corps. J’ai ramené dans ma ville d’Assur leurs biens, leurs troupeaux et leurs familles.
Je suis un berger, dûment appointé, qu’Anu et Bel ont désigné pour les jours futurs. Je suis issu d’illustres ancêtres, quelqu’un qui connaît les dieux, fils de Adad-nirari, préfet de Bel, prêtre d’Assur, petit-fils d’Arik-den-ilu, préfet de Bel, prêtre d’Assur.
Lorsque l’Eharsagkurkurra, le temple de Mon Seigneur Assur, qu’Uspia, prêtre d’Assur, mon ancêtre, a construit, tomba en ruines, alors mon ancêtre Erishu, prêtre d’Assur, l’a restauré. 150 ans s’étaient écoulés depuis le règne d’Erishu et ce temple tomba de nouveau en ruine. Alors Shamshi-Adad (3), prêtre d’Assur, l’a restauré. 580 ans se sont écoulés, et ce temple – que Shamsi-Adad (3), prêtre d’Assur, a restauré – est devenu vieux, un incendie y a éclaté, son édifice sacré, chaque sanctuaire, les vêtements, oui, tous les biens du temple d’Assur mon seigneur, ont été brûlés par le feu.
[…]
Remarques :
(1) Globalement, d’après les toponymes ici localisés, cette expédition a concerné la région du haut Balikh, entre l’Euphrate et le Tigre.  Il n’est pas mentionné de franchissement de l’Euphrate, cependant, l’évocation Arina (Arinu) laisse à penser qu’il a aussi bataillé vers l’ouest du fleuve dans sa partie la plus au sud. De plus, il ne semble pas que l’ordre des toponymes soit significatif d’un itinéraire.

Salua est ici considéré comme étant Sahlala du Mitanni, mais Zalluhan et Zallul des archives de Mari sont aussi des candidats sérieux. Cette préférence vient du fait que cette même désignation a été orthographiée « Sahlalu » dans d’autres textes médio-assyriens et « Zallu » au tout début de l’époque néo-assyrienne. Et surtout, cette cité semble effectivement avoir eu son apogée vers la fin du Mitanni (voir « Die mittelassyrischen Texte aus Tell Chera in Nordoste-Syrien » de Stean Jakob).

(2) Les Qutu ou Kuti sont mentionnés dans diverses annales des rois médio-assyriens. Il est possible qu’ils soient ceux qui ont été désignés « Guti » dans les textes du début du deuxième millénaire.

(3) Ce roi, Shamsi-Adad, est possiblement Samsi-Addu des archives de Mari

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