Timelkiya était Mulukku, près d’Ougarit

D’après les tablettes des marchands assyriens du début du 2e millénaire avant notre ère, il y avait un roi et/ou une reine à Timelkiya. Cette cité était au début du chemin alternatif appelée « l’étroit passage » ou « sukinnu-route », qui était, selon l’hypothèse de ce blog, un contournement maritime de la péninsule anatolienne par l’Ouest.
Le chemin terrestre, de Kanès à Timelkiya – évoqué par une lettre reprise par Gojko Barjamovic dans « A Historical Geography of Anatolia in the Old Assyrian Colony Period » – est d’un coût élevé, significatif d’un parcours très long. Alors que le prix du même équipage est trois fois moins cher entre Hurama et Timelkiya. Hurama apparaît comme une étape intermédiaire entre Timelkiya et Kanès.

Hakan Erol, dans « Kültepe Tabletleri XI », a publié, en deux tomes, les archives de Su-Istar. L’avantage de cette publication réside dans l’affectation de membres de la famille de Su-Istar sur des comptoirs clés hors de Kanès, alors que Su-Istar est le plus souvent à Kanès. Ainsi il apparaît clairement que Dadaya, un petit-fils, est le plus souvent à Timelkiya. Dans Kt 92/k 520, Su-Istar écrit à Assur-imitti ! « Rendez-vous à Timelkiya avec Dadaya et nettoyez les tissus le jour de votre entrée et scellez les bords des tissus avec le sceau de la ville. […] »
Pourtant, certains textes évoquent la présence de Dadaya à Hahhum (il est de même pour La-qepum, autre membre de la famille de Su-Istar), voici par exemple « Kt 92/k 510 » : « Dites à Su-Istar ; De la part de Dadaya et Damiq-pi-Assur : « Plus particulièrement de la part de Damiq-pi-Assur ; Puisque vous n’aviez pas votre document, ni celui de Sarrum-Suen ou celui de l’adjoint de Luzina, l’envoi du commerçant est passé par la porte financière. Il n’a pas été libéré pour Dadaya. […] » ».
Et, donc, le plus souvent, les transports de marchandises effectués sous les responsabilités de Dadaya et La-pequm s’inscrivent entre Hahhum et Timelkiya.
Dans l’article qui suit se trouve une analyse sur les rôles des marchands assyriens lors de leur opérations commerciales de longues distances. Il y est question de « Tamkarum » et de Dadaya, nom rare, dont nous savons qu’il a été, le plus souvent, actif à Timelkiya :
https://dergipark.org.tr/tr/download/article-file/771317
Et nous ajoutons à l’analyse le fait que les assyriens d’Assur ont eu conscience de la dangerosité des transports en mer et qu’ils ont voulu faire porter la responsabilité d’éventuel naufrage au transporteur maritime local. C’est pour cette raison que nous considérons que Timelkiya était un port de la mer Méditerranéenne et que Dadaya y a assumé un rôle similaire à celui d’Ah-salim à Ulama, mais depuis Timelkiya.

Le plus éclairant en ce qui concerne le commerce de gros de longue distance transitant par Timelkiya se trouve dans « Kültepe Tabletleri VI-a » de Mogens Trolle Larsen. Ainsi Kt94/k168 concerne un convoi, entre-autres, de 603 étoffes de textile et 20 talents d’étain. Salim-Assur dit : « 181 étoffes de tissu sont destinées à la contrebande et doivent être déposées à Timelkiya. Le reste des textiles et mon étain doivent être amenés à Kanès ».
« Kt 91/k416 » (de « Kültepe Tabletleri VIII » de Klaas R. Veenhof), donne une précision sur le chemin entre Hahhum et Timelkiya : « Pour mes 2 talents d’étain, 4 textiles de qualité fine, 3 textiles de qualité standard, et un âne noir, que Pilah-Istar amène depuis Hahhum ; Si un taux de 8/1 est possible vends l’étain contre de l’argent et envoi-moi ton reporting ; Si le taux de 8/1 contre de l’argent n’est pas atteint, ne le vends pas contre de l’argent. On ne doit pas transporter l’étain via Salahsuwa. Pour la sécurité de l’étain, vous devez envoyer l’étain via Timelkiya pour Durhumit. Si des gens de Kuburnat sont là, qu’ils reconditionnent l’étain […] »
En même temps, il est mentionné la présence de gens de l’Ouest de l’Anatolie vers ce lieu.
Cela montre que si, depuis Hahhum, Salahsuwa est une destination possible pour l’envoi des tissus, pour l’étain Timelkiya était préférée. Ici il est considéré qu’il s’agit d’un itinéraire davantage vers le sud.

Tamalkiya est la dénomination hittite de la même ville, évoquée dans des textes de l’Ancien Empire Hittite. Ce toponyme a probablement suivi la même évolution que Tismurna qui a perdu sa première syllabe au fil du temps. D’ailleurs, Cécile Michel et Paul Garelli, dans « Correspondance des Marchands de Kanish », ont noté l’utilisation de l’appellation Malikkin dans BIN6,22. Ce nom peut provenir de l’assyrien « malahum » qui signifie « Nautonnier ».

Par ailleurs, dans ces textes paléo-assyriens, Timelkiya n’apparaît pas très souvent avec Mamma et d’autres ports de la côte sud de l’Anatolie.

Pour ces raisons, dans ce blog, Timelkiya est localisée à Mulukku des archives d’Ougarit, déjà référencée dans l’article « Mulukku, des textes d’Ougarit, au Tall Muluk »
Pierre Bordreuil dans « A propos de la topographie économique de l’Ougarit : Jardins du midi et pâturages du nord », dans un chapitre intitulé « Mouloukou et ses jardins » indique que le nom du royaume de Siyannu semble s’être maintenu dans celui du Nahr as Sinn. L’embouchure de ce petit fleuve côtier, au village d’Arab al Moulk, est assez vaste pour abriter une installation portuaire.

Cet ancien port méditerranéen était idéal pour rejoindre Chypre et contourner l’île pas son sud : Cette navigation devait être hors des territoires contrôlés par Kanès et donc être le chemin de la contrebande.

Mes notes de vraisemblance :
Timelkiya était aussi désignée Malikkin au Paléo-Assyrien : 4/5
Timelkiya était Mulukku des archives d’Ougarit : 3/5

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